Les neurosciences viennent de révolutionner nos connaissances du fonctionnement psychique de l’être humain. En découvrant des millions de neurones dans notre intestin grêle, elles mettent en évidence que notre appareil digestif possède une activité cérébrale et une intelligence qui lui est propre. La société occidentale attribuait jusqu’à maintenant le seul rôle de l’intelligence au cerveau à tel point que la psychiatrie et la psychologie ne se sont intéressées qu’à ce qui se passait à l’intérieur de notre tête. Le système de pensée occidentale cherche à simplifier les choses afin de les catégoriser. Nous devons ce concept à Descartes avec son célèbre « Je pense donc je suis ». Tous les mécanismes de la pensée et de l’intelligence étant affectés au seul fonctionnement du cerveau en excluant le reste du corps, le corps et l’individu se sont trouvés séparés et ne forment donc pas une seule entité.
Nous aurions peut-être pu nous en douter ! Notre bon sens au moyen de différentes expressions nous a pourtant alerté : « il faut sortir ses tripes ! », « j’ai du mal à digérer ce qu’il m’a fait ! », « j’ai la peur au ventre !... ». Cette liste est loin d’être exhaustive. Elle nous amène à faire un lien direct entre notre ventre et nos émotions. D’ailleurs ce lien, la sagesse asiatique l’a fait depuis des millénaires. Les mythologies chinoises et indiennes font du ventre le siège de l’âme. Pour les japonais, le Hara, situé 3 doigts sous le nombril, en ont fait le siège de l’énergie vitale le Qi. Du point de vue de l’approche énergétique, ce point correspond pour les indiens au deuxième chakra. Les liens sont donc nombreux entre cette zone de notre corps et notre fonctionnement psychologique.
Le ventre est aussi l’endroit où nait la vie. La citation de Victor Hugo ancre cet état de fait dans notre inconscient collectif : « Le cerveau a la pensée, le cœur a l’amour et le ventre a la paternité et la maternité. ». Notre ventre est donc le siège de la vie. Le fœtus grandit dans le ventre de sa mère. Comme le présente le Docteur Claude Imbert dans ses recherches sur les mémoires prénatales, c’est dans le ventre de la mère que le bébé commence à ressentir et peut être même à « interpréter » les situations auxquelles il est confronté. Pour le Docteur Claude Imbert, c’est durant cette phase que se mettent en place les premiers scenarii
de vie dont l’impact reste présent tout au long de la vie de la personne. Ce qui est certain c’est que le bébé est nourri pendant ces neuf mois par son cordon ombilical. C’est par son ventre qu’il est relié à la vie et à l’amour de sa mère. C’est aussi le siège de l’un des premiers traumatismes de l’enfant : après avoir été malmené par l’épreuve de l’accouchement qui le précipite dans un nouveau monde que l’on imagine plutôt hostile pour le petit être, son cordon ombilical est coupé. C’est la rupture du lien physique avec sa mère. Il est obligé de respirer et de se nourrir de façon autonome. Ces premières épreuves peuvent, suivant les ressentis du bébé, créer des troubles, tels que ceux de l’attachement, qui pourront conditionner toute sa vie d’adulte.
Que penser des découvertes des neurosciences qui confirment la vision des médecines holistiques asiatiques ? Cela pose de véritables questions concernant la psychologie et la psychothérapie. Il ne s’agit pas de remettre en cause l’apport considérable des théories Freudienne et Junguienne dans la compréhension de notre psyché. On peut se demander s’il est possible de considérer qu’un travail de thérapie purement cognitif, niant la globalité de l’être, est à même de traiter des problèmes d’ordre émotionnels dans lesquels notre ventre est impliqué de par les neurones qui s’y trouvent. Ne manque-t-il pas une dimension corporelle à ce travail ? Certes, il est possible de cumuler à la fois un travail de thérapie cognitive avec des activités d’éveil corporel : Yoga, Taï chi, Qi gong… Mais ne manque-t-il pas un lien entre les deux ? Une méthode de thérapie psycho-corporelle telle que la Sophro-Analyse permet de faire le lien entre une sensation corporelle (une douleur, une boule dans la gorge, le plexus serré, un poids sur l’estomac…), une émotion (une peur, une colère…) avec les souvenirs d’une personne et les croyances qui s’y rattachent (évènement traumatique de l’enfance, scénario répétitif…). Comprendre ses réactions, désamorcer ses scenarii de vie, élargir la compréhension de son histoire nécessite une prise en compte globale de l’individu dans toutes ses dimensions. Le mieux-être d’une personne passe par l’équilibre entre les intelligences cognitives, corporelles et émotionnelles. A ces trois formes d’intelligence nous pouvons en ajouter une quatrième dont Carl Gustav Jung fut l’un des pionniers : l’intelligence intuitive ou énergétique. Cette forme d’intelligence nous relie à notre inconscient familial (psychogénéalogie) et à l’inconscient collectif aux travers des nombreux archétypes que nous portons. Elle nous permet d’appréhender ce que notre seul raisonnement cartésien ne peut expliquer. Mettre en équilibre nos quatre formes d’intelligence nous permet de poser un regard différent sur des évènements et de rendre potentiellement possible ce qui sort du cadre de notre compréhension. C'est le premier pas vers la tolérance envers soi-même. L’acceptation de soi peut nous conduire vers l’acceptation de l’autre, la bienveillance, l’empathie et finalement la compassion. Cela nous ouvre de nouveaux horizons dans les relations humaines.
En amenant à reconsidérer l’homme dans sa globalité, les neurosciences nous poussent à remettre en cause notre vision fragmentée de l’être comme Jung l’avait fait en son temps au niveau de la psyché en définissant le processus d’individuation : la réunification de l’Ego construit avec les valeurs profondes de l’inconscient personnel pour retrouver le SOI. Ce concept amène l’Être à la fois vers son centre, vers sa nature profonde, mais aussi vers sa globalité en unifiant les parties conscientes et inconscientes de la psyché humaine.
Nous ne sommes qu’au début d’un chemin où les avancées technologiques nous permettent de mieux comprendre notre comportement, notre pensée, nos souffrances. Nous sommes en train de faire des liens entre la science cartésienne occidentale et la sagesse des pensées ancestrales orientales. L’exclusion de l’une au profit de l’autre nous priverait d’éléments de compréhension : les uns issus des processus scientifiques, les autres de millénaires d’observation des êtres humains. L’approche des psychothérapies humanistes et intégratives dont fait partie la Sophro-Analyse s’inscrit dans ce courant de pensée. La Sophro-Analyse Intégrative, née il y une quinzaine d’années, est en permanente évolution. Elle unifie les apports de la pensée orientale corporelle de la Sophrologie, avec ceux de la pensée occidentale cognitive des différentes techniques de psychothérapies (psychologie junguienne, psychanalyse freudienne, analyse transactionnelle, thérapies énergétiques…) et intègre les dernières avancées des neurosciences. Chaque approche apporte une vision complémentaire permettant de mettre en place au niveau de la personne un changement positif, durable et visible vers le mieux-être.